Le port du Moule

Par Thierry le Lundi 26 décembre 2022 - 2904 vues

La commune du Moule (Moul en créole) est située au milieu de la côte est de la Grande-Terre. Anciennement connue sous le nom de Portland, elle a commencé à se développer vers 1635, sur la rive droite de la rivière d’Audouin.

Exposée aux alizés provenant de l’océan Atlantique, cette ville pourtant dynamique ne connaît pas la fièvre touristique des destinations très prisées de la côte sud-guadeloupéenne. Pour autant, cet endroit de l’archipel a de nombreuses raisons d’être visité. Si vous pensez découvrir un petit port de pêche comme tant d’autres, vous risquez d’être agréablement surpris par son charme unique !

À la découverte du port du Moule

Ne perdons plus une minute et dirigeons-nous vers la ville du Moule. En partant de Pointe-à-Pitre, 28 km sont à parcourir pour traverser de part et d’autre la Grande Terre. Après une petite demi-heure, nous voici arrivés à bon port !

Un site historique

Pour la petite histoire, la ville du Moule est l’une des plus anciennes de Guadeloupe. Les premiers Mouliens et Mouliennes - c’est le nom donné aux habitants de la commune - s’y sont implantés au début du XVIIe siècle. Le nom de la ville est issu du mot « môle » qui signifie la jetée.

Cependant, l’histoire de cette région est bien plus ancienne. Les Amérindiens Caraïbes ont également vécu sur cette partie de la côte du Ve au IIIe siècle av. J.-C. De nombreux vestiges de civilisations précolombiennes ont d’ailleurs été découverts dans la ville.

vue de drone

Le port du Moule étant le seul sur la côte est de la Guadeloupe, il s’est transformé au XVIIe siècle en port commercial et militaire, permettant ainsi aux colons d’exporter le sucre, issu de la canne à sucre, et bien d’autres produits locaux. Durant près de deux siècles, la ville du Moule était donc la plus importante base d’exportation sucrière de l’île, la propulsant au rang de seconde ville de Guadeloupe ! Imaginez l’activité qui y régnait autrefois, aussi bien sur l’eau que sur terre. Des barges effectuaient un ballet incessant entre les quais de chargement et les voiliers qui restaient ancrés un peu plus au large. De concert, les cargaisons de sucre, mais aussi de rhum, de cacao, de coton et bien d’autres marchandises étaient amenées par voie terrestre, mais pas seulement. Un chemin de fer acheminait la marchandise depuis les nombreuses usines centrales présentes sur le territoire de Grand-Terre et plus particulièrement du Moule, dont l’usine Gardel, qui est d’ailleurs la seule à produire encore du sucre en Guadeloupe.

Une vue d’ensemble

Pour avoir une vue d’ensemble imprenable, je vous propose d’aller sur la passerelle qui réunit les deux rives de la rivière Audouin, le seul estuaire faisant face à l’Atlantique. De taille modeste, ce dernier offre une entrée du port assez compliquée pour les bateaux ; le fond est peu profond, la côte à cet endroit étant formée de cayes. D’ailleurs, pour guider les bateaux qui souhaitent s’aventurer plus en avant, de solides ancres marines ont été implantées à différents emplacements sur la caye. Elles permettent d’indiquer l’emplacement exact des rochers, bancs de sables ou coraux aux navigateurs, mais également d’ancrer leur voilier.

passerelle

Tourné face à l’océan, vous voyez la caye de droite et la caye de gauche qui indiquent l’entrée du port, surmontées des ancres.

Sur votre droite, vous pouvez admirer l’Autre-Bord, la rive où siègent le petit port de pêche et la base nautique. Une cinquantaine de bateaux sont amarrés en moyenne dans ce port où vous pouvez observer des pêcheurs s’occuper de leur filet. À proximité, des canoës-kayaks et des planches sont déposés sur le sable blanc. Mais il s’agit avant tout du premier quartier créé par l’aristocratie coloniale, dont le lieu-dit a gardé le nom. Malheureusement, ce bourg qui abritait l’église a été détruit à la suite d’un cyclone et d’un tremblement de terre en 1843. Pour des raisons de commodités en lien avec l’activité commerciale du port, le bourg a été reconstruit sur l’autre rive.

En face de l’Autre-Bord, prenez le temps d’observer les ruines, découpées dans la pierre calcaire corallienne, et les autres vestiges d’entrepôts dont la dimension reflète l’activité d’antan. Vous pouvez également apercevoir l’ancienne grue qui permettait les chargements du sucre. Ils sont les seuls témoins de cette faste période où le commerce menait bon train.

Un haut lieu du commerce colonial

Les vestiges encore visibles du port attestent de son importance. Bien qu’il ne soit pas de grande dimension, il a joué un rôle primordial dans l’exportation des produits coloniaux de Guadeloupe durant près de 200 ans. C’est donc par souci de préserver ces marchandises destinées à la France métropolitaine, qu’un fortin a inévitablement été érigé, ainsi qu’un môle de protection agrémenté d’une batterie de canons pointés vers le large. Vous pouvez voir une poignée de ces canons en fonte, toujours en place depuis le XVIIIe siècle et les vestiges d’une petite poudrière qui sont juste à côté. Ces canons étaient destinés à tenir à bonne distance les navires de la flotte anglaise durant la longue période des guerres napoléoniennes, jusqu’en 1810, date de capitulation de la Guadeloupe, qui fut alors reprise par les Anglais.

Parmi les ruines qui bordent le port sur la rive gauche, on peut visiter l’Espace Wizosky. Ces vestiges, en pierre calcaire corallienne qui se fondent parfaitement avec le port historique, correspondent à une ancienne bâtisse destinée à stocker et à vendre les marchandises. Aujourd’hui, il ne reste que certaines parties d’un mur à arcades, mais imaginez sa structure complète alors qu’un premier étage, entièrement fabriqué en bois, était encore en place. En 1807 ce bâtiment était la propriété d’un gros négociant, Monsieur Franceschi. En 1920, il a été transformé en usine de jus de citron concentré avant d’être vendu en 1923 à une société commerciale de plantes coloniales dont le gérant était Monsieur Wizosky. Après le cyclone de 1928 qui a fait d’importants dégâts sur la commune, celle-ci a racheté cette construction pour en faire une école provisoire.

Le port du Moule, situé sur le littoral atlantique, a donc été le premier port sucrier de Guadeloupe au XVIIIe siècle. Il témoigne encore aujourd’hui du dynamisme économique que la ville du Moule et sa région ont pu connaître, alors que le port était le plus important site d’exportation sucrière de l’île. Cependant, le port du Moule, du fait d’une grande exposition aux vents, à la houle et aux raz-de-marée, ainsi que d’une taille réduite et d’un manque de profondeur marine, s’est vu obligé par la suite de céder sa place au port de Pointe-à-Pitre.

Aujourd’hui, le port du Moule est relayé au statut de petit port de pêche, mais son charme n’en est pas moins réduit, d’autant qu’il côtoie la plage de l’Autre-Bord où règnent sable blanc, cocotiers et raisiniers, pour le plus grand plaisir des locaux et des touristes.

Une petite recommandation ? Sortez et profitez de la vie !

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